Fiction / Suisse

99 MOONS

Bigna, sismologue de 28 ans, veut tout contrôler, jusqu’à ses jeux érotiques où elle domine ses partenaires. Frank, 33 ans, travaille de nuit dans des clubs où il s’évade dans les paradis artificiels et les relations sans lendemain. Ces deux mondes que tout oppose entrent en collision, puis s’unissent, entre attraction sexuelle et désir de liberté, déclenchant une folle histoire d’amour qui s’égrène sur 99 lunes.

ACID – Cannes 2022

ANNÉE
RÉALISATION
SCENARIO
AVEC
FICHE TECHNIQUE
DATE DE SORTIE

2022

Jan GASSMANN

JAN GASSMANN

Valentina DI PACE, Dominik FELLMANN, Danny EXNAR, Jessica HUBER…

1h50 – Couleur – 2.35 – Dolby Digital 5.1

10 Mai 2023

ENTRETIEN AVEC LE RÉALISATEUR

« La recherche du véritable amour a supplanté la recherche de Dieu à notre époque. 99 Moons jaillit du présent, est proche et intime, nu et libre »

 

Jan Gassmann

 

Les relations de couple sont un thème récurrent dans vos films, comme récemment dans « Europe, She Loves ». Qu’est-ce qui vous intéresse tant dans ce domaine ?

 

L’amour reste pour moi une sorte de pouvoir anarchiste dans une société fortement marquée par les principes économiques. On ne peut pas choisir de qui on tombe amoureux ou de qui on est sexuellement attiré. L’amour est plein de mystères et de conflits qui me fascinent en tant que cinéaste. Chaque relation cherche ses propres idéaux, règles et comportements. Dans « 99 Moons », il s’agissait pour moi d’examiner ces idéaux à la loupe et de montrer différentes formes de relations entre deux personnes. Où commence une relation ? Où ne parle-ton que de sexe ? Comment réussir une relation ? Par la fidélité absolue ? Par l’amour libre ? Par l’abandon du monde ?

 

Vos personnages principaux ont des projets de vie très différents et la sexualité joue un rôle important dans les deux cas. Comment ces personnages sont-ils apparus lors de l’écriture du scénario ?

 

Le scénario de « 99 Moons » a connu une phase de développement de près de dix ans. Les personnages ont vieilli avec moi, ils se sont posés d’autres questions au fil du temps et ont réagi différemment aux situations. Dès le début, j’avais une idée précise de Bigna, le personnage principal féminin.

Le personnage principal masculin, Frank, a été plus difficile à développer pour moi, car il est plus proche de moi en tant qu’homme et j’ai eu plus de mal à le considérer objectivement. La sexualité de Bigna est née d’une part de recherches et d’entretiens, mais aussi du désir de briser les habitudes visuelles. Bigna prend sexuellement ce dont elle a besoin. Elle fixe les règles et détermine comment doivent se dérouler ses rencontres sexuelles avec les hommes, à savoir le plus anonymement possible et sans deuxième fois. Il en va de même avec Frank. Mais il réveille quelque chose en elle qui la pousse à revenir vers lui… Frank, quant à lui, est enfermé par son entourage hipster, qui se veut « moderne » et « ouvert », dans un rôle d’homme tout de même assez classique, que l’expérience avec Bigna va faire exploser. C’est grâce à elle qu’il découvre qu’il est purement excité par son désir, qu’il apprécie d’être dominé et que la sexualité est également possible sans pénétration. Le film est aussi pour moi une réflexion sur la dissolution des rôles sexuels classiques et sur la liberté que nous pourrions en retirer – mais dont beaucoup d’entre nous ont encore peur.

 

Vous avez décidé de confier les deux rôles principaux à des non-professionnels, pourquoi ?

 

Ma directrice de casting Lisa Olàh et moi-même avons invité à peu près autant de non-professionnels que d’acteurs professionnels à participer au casting, qui a duré deux ans. La décision de tourner avec deux non-professionnels dans les rôles principaux a été prise à la toute fin. Nous avons pris cette décision plus selon notre intuition qu’en fonction du CV des acteurs. Ce qui nous importait, c’était l’alchimie entre les acteurs et les actrices, le rejet, l’attirance, la friction, leur relation avec leur corps. Nous savions que le casting de cet amour fou aurait une influence décisive sur le film final, et bien sûr, c’était un risque de tourner avec deux personnes qui n’avaient jamais été devant une caméra de cinéma. En même temps, ils nous ont surpris tout au long du tournage. La décision peut se résumer ainsi : Avec les acteurs professionnels castés, j’avais une idée claire du film fini, avec Valentina et Dominik, j’ai choisi une boîte noire avec la chance de créer quelque chose qui va au-delà de ce que j’avais imaginé.

 

À quoi faut-il faire attention quand on tourne avec des non-professionnels ? Votre expérience de réalisateur de documentaire vous a-t-elle aidé ?

 

J’ai les mêmes exigences envers les non-professionnels qu’envers les acteurs : Ils doivent avoir le don d’être présents au moment où la caméra tourne. C’est-à-dire vivre devant la caméra, respirer correctement, fumer – avoir de la clarté et du calme en soi. C’est ce qu’il y a de plus difficile pour tous les acteurs.

L’improvisation est pour moi un outil important pour créer de nouveaux moments « vrais » et ne pas tomber dans la répétition. Mon expérience de réalisateur de documentaires se ressent sur mes plateaux de fiction : Je donne aux acteurs une grande liberté de mouvement dans l’espace, la caméra doit réagir à eux et non les acteurs à la caméra. Les plateaux sont aménagés à 360 degrés et peuvent être entièrement utilisés. S’il y a un tourne-disque, il fonctionne et on peut écouter de la musique. Je tourne presque toujours en longues prises qui doivent être condensées au montage. J’aime les accidents créatifs et les coïncidences sur le plateau. Même si je me prépare minutieusement en amont avec mon équipe, je veux être moi-même créatif sur le plateau. C’est pourquoi, pour moi, un tournage est toujours placé sous la devise : « Permission to fail… ». Ce n’est pas grave si quelque chose se passe mal. Cela nous permet de prendre des risques. Je pense que cette manière de tourner convient aux non professionnels, car il ne s’agit pas de reproduire parfaitement une idée de mise en scène, mais de saisir des moments dans le présent.

 

Le film contient de nombreuses scènes intimes. Comment avez-vous procédé pour les réaliser ? Qu’est-ce qui était important pour vous dans la représentation de la sexualité ?

 

Dès l’écriture du scénario, il était clair que la réalisation des scènes intimes serait un défi. C’est pourquoi les producteurs de Zodiac ont proposé très tôt que je puisse tourner avec l’aide d’un coordinateur de l’intimité. Le travail de coordinateur d’intimité est assez nouveau sur le plateau et c’était génial de travailler avec Cornelia Dworak pour « 99 Moons ». Nous avons répété de nombreuses scènes intimes à l’avance, élaboré des chorégraphies détaillées, pour pouvoir ensuite agir librement sur le plateau avec des limites prédéfinies en ce qui concerne les contacts ou les positions de la caméra. Outre les règles claires du « plateau fermé » (seules quelques personnes sont présentes sur le plateau afin de créer une atmosphère aussi intime que possible), j’ai appris beaucoup de choses sur la communication en matière d’intimité. Par exemple, comment nommer concrètement et sans honte les parties du corps en tant que réalisateur, et ainsi démystifier les scènes de sexe. Les acteurs peuvent ainsi se concentrer sur leur jeu et sur le moment, sans être freinés par la honte.

 

Vous avez tourné l’histoire avec une petite équipe, autant que possible de manière chronologique. Qu’est-ce que cela a signifié pour le tournage ?

 

J’aime tourner de manière chronologique. Cela me donne, mais aussi à l’équipe, le sentiment d’avancer dans une histoire et dans un monde. En même temps, le tournage chronologique est un luxe pour le réalisateur et les acteurs, car il prend plus de temps et nécessite une logistique plus compliquée. Pour ce tournage, c’est ce qu’il fallait faire : nous avons pris plus de temps, et nous avons choisi de ne pas avoir une plus grande équipe mais plus de possibilités de création. Par exemple, nous avons tourné avec un éclairage fixe et n’avons pas ajusté la lumière en permanence. De plus, nous avons souvent travaillé avec de « vraies » sources de lumière, celles que l’on voit à l’image.

À PROPOS DU RÉALISATEUR

Jan Gassmann fait partie des cinéastes suisses les plus renommés au niveau international. Tous ses films ont été sélectionnés dans des festivals internationaux et ont reçu des prix importants. Son dernier film, « Europe, She Loves », a ouvert la section Panorama à la Berlinale, a été nominé pour le Prix du cinéma européen et a remporté de nombreux prix nationaux et internationaux. « 99 Moons » a été présenté en première mondiale au Festival de Cannes dans la section « ACID » et en première suisse au Zurich Film Festival 2022.

DEVANT LA CAMÉRA

Valentina Di Pace (Bigna)

 

Valentina Di Pace a étudié l’art à l’Académie des Beaux-Ar ts de Riga, en Lettonie. Après avoir obtenu son diplôme en 2013, elle a travaillé en tant qu’artiste indépendante. « 99 Moons » est sa première expérience en tant qu’actrice dans un long métrage. Valentina a des origines siciliennes et travaille à Zurich.

 

Dominik Fellmann (Frank)

 

Dominik Fellmann a découvert l’art cinématographique dès son plus jeune âge. Depuis, il s’adonne à sa passion de documenter son environnement par le biais de médias numériques et analogiques. En plus de son travail de cinéaste, il est également DJ. « 99 moons » est sa première expérience devant la caméra en tant qu’acteur. Actuellement, Dominik travaille comme réalisateur et caméraman dans la production vidéo.

MUSIQUE

Michelle Gurevich (Musique)

 

Les chansons de la canadienne Michelle Gurevich, devenue une icône berlinoise et jouant à guichets fermés dans le monde entier, se distinguent par un style mélodramatique et des textes sincères et émotifs. Sa musique est influencée par son héritage russe et s’inscrit dans la tradition de Leonard Cohen . Les claviers vintages et les cordes synthétiques permettent la création de moments émotionnels et cinématographiques, en écho avec la voix des acteurs.trices. Pour « 99 Moons », Michelle Gurevich a réinterprété des morceaux existants mais elle a aussi créé des musiques inédites.

CE QU'EN DIT LA PRESSE

LES FICHES DU CINÉMA

Un film âpre et sincère, à la mise en scène parfois étouffante, qui explore avec humilité les limites d’un modèle hétéronormé à bout de souffle.

 

L’OBS

Les deux acteurs non professionnels (excellents) sont subjugués par leurs rôles, sans qu’on puisse se défendre d’une certaine distance née de la répétition. Le cul, à outrance, est fastidieux. Reste la flamme qui court dans le film, authentique et puissante.

 

TÉLÉRAMA

Une réussite sur un thème éculé.

LISTE TECHNIQUE ET ARTISTIQUE

Liste artistique

 

Bigna : Valentina Di Pace
Frank : Dominik Fellmann
George : Danny Exnar
Barbara : Jessica Huber
Max : Leo Matteo Girolamo
Thaks : Gregory Hari
Sara : Ale Lindman
Nadja : Katerina Stoykova
Tina : Annina Machaz
Femme avec chien : Noemi Ceresola
Divna : Lia J. von Blarer
Femme du taxi : Kathrin Schweizer

 

Liste technique

 

Réalisateur : Jan Gassmann
Scénariste : Jan Gassmann
Directeur de la photographie : Yunus Roy Imer
Montage : Miriam Märk & Jacques l’Amour
Son : Florian Hinder
Sound design : Oscar van Hoogevest
Musique : Michelle Gurevich
Chef décorateur : Mirjam Zimmermann
Costumes : Sophie Reble
Chef maquilleuse : Marina Aebi
Casting : Lisa Olàh
Directrice de production : Aminta Iseppi
Producteurs : Reto Schaerli & Lukas Hobi

HORAIRES DU 7 AU 13 JUIN

Samedi : 21h45