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LA VIE DE CHÂTEAU, MON ENFANCE À VERSAILLES

Fiction / France, Luxembourg

Violette a 8 ans, du caractère à revendre et un nouveau tuteur ! En effet, depuis la mort de ses parents, elle doit vivre chez son oncle Régis, agent d’entretien au château de Versailles. Lui, c’est un géant bourru, elle une petite fille têtue qui refuse de lui parler et fugue dès qu’elle peut ! Mais dans les coulisses dorées du Roi Soleil ces deux solitaires vont peu à peu s’apprivoiser , apprendre à se connaître, et se découvrir une nouvelle famille…

Année

2025

RÉALISATION

Clémence MADELEINE-PERDRILLAT, Nathaniel H'LIMI

SCENARIO

Clémence MADELEINE-PERDRILLAT, Alice VIAL, Olivier DEMANGEL

AVEC

Nina PEREZ-MALARTRE, Emi LUCAS-VIGUIER, Frédéric PIERROT, Malcolm VALLET-ARMELLINO

FICHE TECHNIQUE

1h21 - Couleur - Dolby Digital 5.1

DATE DE SORTIE

15 OCTOBRE 2025

HORAIRES

à venir

ENTRETIEN AVEC CLÉMENCE MADELEINE-PERDRILLAT, SCÉNARISTE & CO-RÉALISATRICE.

Pouvez-vous décrire votre parcours d’auteure, de scénariste et de réalisatrice ?

 

Pendant mes études de littérature je me suis mise à travailler sur des tournages grâce au hasard des rencontres. Je me suis rendue compte que mon amour de la littérature pouvait rejoindre l’écriture d’histoires sous la forme de scénarios. J’en ai écrit plusieurs, puis j’ai réalisé trois courts-métrages, dont un produit par Films Grand Huit, qui allaient devenir plus tard les producteurs de La Vie de Château. Au bout de quelques années dans le milieu du court-métrage, j’ai commencé à travailler sur un certain nombre de séries, la plupart conçues par des réalisatrices et réalisateurs de cinéma. J’ai notamment travaillé avec Valérie Donzelli, les Frères Larrieu, Éric Tolédano et Olivier Nakache sur En Thérapie. 

Mon prisme a consisté à aborder les séries avec un angle cinéma, si je puis dire. Parallèlement j’ai développé La Vie de Château avec Nathaniel H’Limi à partir de 2016.

 

En voyant La Vie de Château, on est frappés par la justesse du traitement des personnages. Avez-vous étudié la psychologie et la psychanalyse pour vous en servir dans vos nouvelles, puis dans vos créations audiovisuelles ?

 

La psychologie m’a toujours passionné. J’ai lu beaucoup et surtout, j’ai moi-même été en analyse pendant douze ans. Ce travail a été déterminant dans mon écriture et mon rapport au scénario : mon accès à une histoire passe par les personnages. Après avoir conçu La Vie de Château, j’ai travaillé sur En Thérapie et j’ai lu d’autres ouvrages, rencontré de nombreux psychanalystes et psychologues. 

C’est un élément de la narration qui m’intéresse mais je reste toujours vigilante à ne pas tomber dans « le psychologisant ». J’essaie de trouver le moyen de faire comprendre au spectateur où en sont les personnages grâce à des idées visuelles comme celle du feu, du pull jaune jeté dans les flammes et des cris libérateurs poussés par Violette et Régis… 

 

Comment les personnages de La Vie de Château sont-ils nés ? 

 

En 2016, France Télévisions a fait un appel à projet intitulé « Écrire pour une héroïne contemporaine ». Nous venions de vivre les événements de novembre 2015 et après ces drames, je me suis demandée : ‘Que va-t-on dire à nos enfants ? Comment allons-nous leur parler de ça ?’ 

J’ai parlé à Nathaniel de mon envie de raconter l’histoire d’une petite orpheline : Violette était déjà en train de naître dans ma tête et il a tout de suite été enthousiaste. Nous avons alors déposé le dossier du projet – avec Lionel Massol de Films Grand Huit – et nous avions une certaine appréhension. Quelle place les attentats devaient-ils occuper dans cette histoire ?… Mais nos interlocuteurs de France Télévision souhaitaient eux-mêmes en parler, et nous nous sommes rendus compte que le cœur de l’histoire, c’était la reconstruction individuelle et collective, après une événement traumatique. Violette est donc née à ce moment-là, puis Régis. Et comme souvent dans mon processus de travail, la dramaturgie du  récit s’est construite petit à petit.

 

Quel a été l’apport de Nathaniel quand vous avez construit les arches narratives de l’histoire ? Comment collaborez-vous?

 

Mon apport au dessin, c’est un commentaire. Et l’apport de Nathaniel à l’écriture est le même. Nous connaissons tous les deux nos forces et nos limites : il vous dira sans doute qu’il serait démuni s’il devait écrire un scénario de film, tout comme je serais incapable de dessiner des personnages et des décors ! En collaborant, nous savons déterminer ce qui ne nous plaît ou non, à quel moment nous sommes émus ou pas. Je n’ai aucune légitimité de dessinatrice, mais si je demande à Nathaniel de refaire cinq fois un dessin, il l’entend et me dit « C’est juste : là on n’y est pas encore ». Et de mon côté je tiens compte de ses réactions aux textes pour les retravailler, même s’il n’a pas forcément les outils dramaturgiques ou scénaristiques pour pointer exactement ce qui ne fonctionne pas. Nous savons tous les deux quels sont nos objectifs, et nous sommes la boussole l’un de l’autre. 

Nous sommes extrêmement complémentaires. 

 

Quel a été votre processus pour créer les personnages secondaires, puis les interactions et les conflits qui permettent à tous les protagonistes d’évoluer ? 

 

Ce qui a été déterminant, c’était de trouver « l’arène », le lieu où de nombreuses scènes allaient se passer. Au début, l’environnement était parisien. J’ai eu très vite envie que Violette fasse des fugues, que ce soit un motif récurrent de l’histoire. C’est une petite fille qui n’accepte pas son deuil, qui est en colère. Et le film raconte que Violette a besoin de temps, a besoin de cette mécanique du deuil, de l’aller-retour dans les sentiments, de cette fameuse étape psychologique de négociation. 

Quand j’ai trouvé l’idée de Versailles, ça m’a soulagée : nous allions disposer d’un décor qui évoque les contes de fées, on allait placer un « ogre » : Régis, une bonne fée : Geneviève… 

L’autre idée consistait à aborder l’environnement enchanteur du château de Versailles du côté des coulisses, et rester avec ceux qui travaillent pour entretenir ces lieux, et « qui sont au service de l’Histoire », comme le dit Olga. A partir de ce moment-là, je disposais d’un terrain de jeu immense et riche pour les personnages. Ils sont donc arrivés naturellement, d’abord Olga, puis ses enfants, puis les autres… Mais je dirais aussi qu’une fois que Violette et Régis avaient été créés, le conflit principal devenait : « Vont-ils former une famille ? ». 

 

Qu’avez-vous suggéré à Nathaniel, pendant la recherche du design des personnages et du traitement des décors ? 

 

Pendant la création en elle-même, nous avons testé toutes sortes d’idées. Nathaniel a essayé différents systèmes de brosses, pour dessiner avec un trait plus ou moins fin, avec plus ou moins de texture. Il me montrait tous ces essais et petit à petit, nous sommes arrivés au résultat qui nous a plu. Quand nous avons travaillé sur l’aspect de Violette, j’ai dit d’emblée à Nathaniel qu’il fallait qu’elle se détache très nettement du décor fastueux de Versailles, en termes de colorimétrie. Il fallait qu’elle ait des cheveux orange, un pull jaune moutarde… Et j’avais aussi cette idée toute simple de travailler comme Hergé, avec des personnages toujours habillés de la même manière. Je ne me doutais pas, à l’époque, à quel point ce serait précieux qu’ils portent toujours les mêmes tenues, pour pouvoir faire du remontage de scènes ! Voilà comment la création des personnages a été affinée à deux. Ensuite, il y a eu une autre étape passionnante, celle de la création de la mise en scène, avec l’aide de nos storyboarders Jean-Christophe Roger et Charlotte Cambon. Nous déterminions ensemble comment nous allions cadrer les plans. À ce moment-là, je pouvais gribouiller des petits bonhommes bâtons et dire « Voilà comment je visualise la longue séquence dans Versailles ». Par exemple, nous avons beaucoup pensé à Shining, au petit garçon roulant avec son tricycle dans les immenses couloirs de l’hôtel…

 

Quelles étaient les questions récurrentes que vous vous posiez pendant la conception du storyboard et de la réalisation ? 

 

Nous nous demandions toujours où situer la caméra pour être au plus près, au plus juste, des personnages.

 

Les dialogues des enfants et des adultes « sonnent » toujours juste. Utilisez-vous une méthode particulière pour les préparer, les écrire et les peaufiner ? Ou avez-vous une mémoire de dialoguiste si fine que vous « enregistrez » dans la vie courante les paroles que vous intégrez ensuite dans vos scripts ? 

 

Je me suis beaucoup inspirée des enfants que j’ai autour de moi et de l’enfant que j’ai été pour faire parler Violette. Concernant les autres personnages, je parle beaucoup toute seule chez moi quand j’écris des dialogues ! 

Je les dis vraiment, à voix haute. Et j’aime l’idée que l’identité de chacun des protagonistes se retrouve dans sa façon de s’exprimer. C’est la raison pour laquelle Geneviève répète tout trois fois. Régis, lui, utilise parfois des expressions un peu datées, qui rappellent son côté « vieux garçon à côté de la plaque » que j’aime beaucoup. Leurs personnalités se sont affirmées en écrivant et réécrivant les dialogues. 

 

Cette histoire est racontée à la hauteur du regard de Violette et des autres enfants. Même si les dialogues semblent simples, ils réussissent à expliquer des choses complexes aux petits comme aux grands. Comment vous appuyez-vous sur les émotions des personnages pour nous faire comprendre les mécanismes du deuil, de la résilience et des conflits familiaux ? 

 

Ce n’est pas évident à expliquer parce que c’est très intuitif. J’avais à cœur de me baser sur la perception que j’avais quand j’étais petite. Quand on est enfant, on sent qu’il y a des conflits entre les adultes mais on ne parvient pas exactement à s’expliquer pourquoi. C’est pour ça que j’aime tant la séquence avec les grands-parents : elle résume bien où se situe 

Violette dans cette situation familiale compliquée. Elle est au cœur de ce conflit et on ne parle pas des problèmes devant elle. Violette entend les piques acides et les reproches échangés par les adultes, et nous, spectateurs, sommes aussi témoins de cela. J’espère qu’un enfant spectateur se retrouve au même niveau que Violette : il se demande ce qui se passe, pourquoi ça a l’air complexe. Il comprend très bien qu’il y a un truc qui ne va pas. Les spectateurs adultes comprennent autre chose et voient le sous-texte, les non dits. Le retour qu’on nous fait sur le film, c’est que les adultes se retrouvent aussi dans cette narration. J’ai vraiment essayé de travailler en n’étant jamais « en avance » sur l’évolution à venir des personnages, mais en restant avec eux.

 

Vous faites dire à Violette : « Les problèmes des adultes, ça devient souvent les problèmes des enfants », et vous montrez qu’elle ne dispose pas forcément de solutions pour les résoudre…

 

Les difficultés du monde des adultes sont perçues avec justesse par les enfants, mais quand Violette essaie de réparer les liens entre Régis et ses parents, elle utilise les moyens d’enfant dont elle dispose. Quand elle fait des photos de Régis au travail avec l’aide de Malcolm, c’est naïf, bien sûr, mais c’est la seule manière dont elle peut agir dans l’immédiat. Le piège, quand on est scénariste, c’est d’écrire des scènes avec des enfants en les faisant agir comme des adultes. J’ai veillé à ce que Violette et ses copains restent toujours dans leur niveau de compréhension. C’est d’ailleurs pour ça qu’au début, Violette a une « mauvaise lecture » de ce qui s’est passé entre sa mère et Régis, parce qu’elle n’a pas les explications nécessaires pour comprendre les paliers de difficultés qui se sont accumulés entre ses grands-parents, sa mère et son oncle. 

 

On est souvent amusé et ému par la manière dont les idées narratives sont exprimées visuellement, comme le symbole égyp￾tien d’œil qui flotte au-dessus de la maison de Régis la nuit, quand Violette a du mal à comprendre pourquoi on l’appelle une « pupille de la nation ». Ou l’image de Juliette, la maman de Violette, lorsqu’elle était une petite fille, qui se substitue à celle de Violette quand son grand-père la regarde…Comment avez-vous travaillé avec Nathaniel sur ces moments-là ? 

 

Ce sont d’abord des trouvailles scénaristiques, écrites dès le début. Par exemple quand l’image de Juliette et de Violette se superposent… Il y avait aussi l’idée dès l’écriture qu’à la fin du film on vive un flashback, intégré au moment où Violette retourne enfin chez elle. J’ai la sensation que c’est cela, le vrai pouvoir de l’animation… Elle me bouleverse quand elle me transporte dans des endroits de poésie qui seraient beaucoup plus difficiles à atteindre en prises de vue réelles. 

Ou alors, on changerait vraiment de genre d’un seul coup, ce serait bizarre… Parmi toutes les idées que je peux avoir en écrivant, c’est vraiment ce qui différencie mon métier de scénariste de fictions en prise de vues réelles de celui de scénariste de film d’animation. En animation, la poésie est plus facilement atteignable. Et même quand l’action se déroule dans un univers relativement réaliste, on peut malgré tout faire surgir un fantôme, une petite souris, etc. Et merci d’évoquer cette scène où le grand-père parle avec sa petite fille car c’est quelque chose qui me touche que j’observe autour de moi : on voit souvent dans les enfants, les personnes que leurs parents ont été. C’est très troublant, même quand il ne s’agit pas de situations dramatiques. Un enfant arrive et il est porteur de toute sa parentalité, de son histoire familiale, c’est bouleversant.

Il y a aussi un gag visuel très attendrissant : celui de la maison qui tangue avec les ronflements de Régis, qui au début, exaspèrent Violette et qui, au bout d’un moment, la rassurent parce qu’ils ont fait la paix et se sont trouvés. 

C’était écrit dès le scénario, on avait à cœur que la maison soit la métaphore de l’état de Violette. Tout ce qui est pénible pour elle au début : les ronflements, l’univers sonore qu’elle ne connaît pas, devient quelque chose qui la berce… Sur cet aspect visuel, je dois dire qu’au début, nous avions intégré beaucoup plus de jeux de mots, notamment autour de « pupille de la nation ». Mais on nous a fait remarquer très justement que cela pouvait vite devenir un truc d’adulte, car les jeux de mots à cet âge-là, ce n’est pas si facile à faire. Ça vient plus tard, pendant la préadolescence. Là, il s’agit d’enfants qui sont en CM1. Nous sommes donc restés du côté de l’enfance. 

 

Tous les comédiens du casting vocal sont au sommet de leur art, et arrivent à exprimer des émotions extrêmement subtiles en jouant. Pouvez-vous nous parler des raisons précises pour lesquelles vous avez choisi chacun des acteurs qui tiennent les rôles principaux ?

 

D’abord, nous voulions enregistrer les voix des enfants avec de vrais enfants, et non pas des comédiens adultes qui doublent des enfants, comme cela se fait dans la plupart des cas. Cette partie du casting vocal a été très longue, parce que nous cherchions une petite fille avec un timbre de voix très grave, un peu cassé. Et nous l’avons trouvée ! Pour des questions de production elles sont deux : Emi Lucas-Viguier et Nina Perez-Malatre, et nous avons adoré ce qu’elles ont fait. Concernant les adultes, nous avions tout de suite pensé à Frédéric Pierrot pour incarner Régis. C’était bien avant que je ne travaille sur En Thérapie, avant que sa voix de thérapeute ne vienne résonner en nous. Je le suivais depuis longtemps au théâtre, d’ailleurs ce n’est pas un hasard si notre casting est composé de beaucoup d’acteurs de théâtre, comme Jacques Weber, Anne Alvar… Ce sont des artistes pleinement conscients de leurs voix. Frédéric a un timbre extrêmement rassurant et chaleureux. Anne Alvaro est une de mes comédiennes préférées. Et tout le reste du casting est composé de gens qui ont des signatures vocales que j’adore. Thierry Lhermitte a un phrasé très articulé et on trouvait très drôle de lui faire jouer Louis XIV. Pour le couple des grands-parents, Ariane Ascaride et Jacques Weber ont comme Frédéric Pierrot des voix assez graves, mais qui expriment une grande tendresse. Nathaniel et moi aimons les voix avec des basses, à l’opposé de ce que l’on entend souvent chez Disney, par exemple, où les personnages d’enfants ont des voix hautes – qui correspondent d’ailleurs davantage à la réalité. Nous savions qu’il fallait qu’elles soient plus douces, plus confortables, plus cotonneuses… 

 

Comme on s’attache très vite aux personnages de La Vie de Château, on aimerait savoir ce qui va leur arriver… 

 

Nous aussi ! Nous aimerions continuer à accompagner Violette, Régis, Olga et toute la petite bande qui vit à nos côtés depuis 2016 ! 

Comme une bonne étoile veille sur La Vie de Château, nous réfléchissons à une suite.