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BRUJERÍA - SORCELLERIE

Fiction / Chili, Mexique, Allemagne

Île de Chiloé, au large du Chili, en 1880. Rosa Raín est une jeune fille huilliche dont le monde s’effondre le jour où son père se retrouve assassiné par des colons allemands. Habitée par un désir de vengeance, elle fait la rencontre de Mateo, chef d’une mystérieuse organisation de sorciers. À leurs côtés, Rosa Raín va se découvrir de mystérieux pouvoirs dont elle se servira dans sa quête obstinée de justice…

Année

2023

RÉALISATION

Christopher MURRAY

SCENARIO

Christopher MURRAY, Pablo PAREDES

AVEC

Valentina VÉLIZ, Daniel ANTIVILO, Sebastian HÜLK

FICHE TECHNIQUE

1h42 - Couleur - Dolby Digital 5.1

DATE DE SORTIE

5 MARS 2025

HORAIRES DU 12 AU 18 MARS 2025

MER. 12 • VEN. 14 • LUN. 17 : 16h00

JEU. 13 • SAM. 15 : 12h10

BIOGRAPHIE DU RÉALISATEUR

Christopher Murray est un réalisateur et scénariste d’origine chilienne. Diplômé en réalisation audiovisuelle de l’université catholique du Chili, il réalise en 2010 son premier long-métrage Manuel de Ribera dont il assure également le montage. Présenté en avant-première au Festival du Film de Rotterdam, ce film lui permet de se faire remarquer à l’international.

 

En 2016, son deuxième long-métrage El Cristo Ciego (Le Christ aveugle) est présenté en compétition officielle à la Mostra de Venise. En parallèle de ces deux fictions, Christopher Murray a également co-réalisé les documentaires Propaganda et Dios. Tous les deux présentés en première mondiale au festival Visions du Réel. Son nouveau film, Brujería, a été présenté en avant-première mondiale lors de l’édition 2023 du Festival Sundance.

ENTRETIEN AVEC LE RÉALISATEUR

Quelle a été la genèse du film ?

 

Ma grand-mère était originaire de l’Île de Chiloé et me racontait des histoires autour des sorcières. 

Puis j’ai entendu parler de cette véritable affaire survenue en 1880 dans laquelle l’État du Chili avait décidé de poursuivre en justice  une organisation de magiciennes  baptisée « La Recta Provincia ». 

J’ai donc consulté les documents  juridiques du procès puis je suis allé sur place afin de procéder à un  travail à caractère ethnographique de manière à comprendre ce que  représentait réellement la sorcellerie  pour les habitants de Chiloé. À  bien y regarder, je crois que les  sciences occultes n’étaient pas  que de simples histoires locales. 

Au contraire, elles avaient une forte  composante politique. Il y avait une  forme de résistance territoriale qui  se matérialisait avec le recours à la  sorcellerie. C’est sur cette base que  j’ai construit le film.

 

Brujería lorgne du côté du fantastique à plusieurs reprises. Diriez-vous que c’est un film de genre ?

 

Lorsque je recherche, que j’écris puis réalise un film, je ne pense pas aux genres. J’essaie de répondre à ce que le lieu et l’histoire demandent de manière organique. Je pense surtout aux cadres, aux émotions, au paysage visuel et sonore, à la texture ou encore à l’atmosphère. C’est également à prendre en compte puisque dans Brujería, outre les éléments surnaturels. Il y a aussi quelque chose de très naturaliste que je recherchais.

 

La première scène du film, toute en tension et suspense, est assez impressionnante. Comment l’avez-vous construite ?

 

C’est un véritable travail d’équipe. 

Je pense qu’une grande partie de la réussite de cette scène réside sur certains paramètres en particulier tels que la conception sonore et la dimension étrange véhiculée par les chiens. Une grande partie de ce qui se passe lors de cette séquence introductive se déroule hors-champs. 

Le spectateur est dans le flou. Il doit accéder par lui-même à ce moment de douleur et d’horreur dans la vie de Rosa.

 

Quelle était l’importance de la sorcellerie et de la magie au Chili au XIXème siècle ? Est-ce que les sciences occultes ont-elles toujours une place importante aujourd’hui ?

 

La sorcellerie est fondamentale pour comprendre le fonctionnement de l’Île de Chiloé et son histoire politique. Cette pratique a été une forme de résistance contre le colonialisme venu d’Europe. 

« La Recta Provincia » était une organisation vouée aux sciences occultes. Grâce à cette organisation, il existait sur ce territoire un état parallèle à celui du Chili avec sa propre hiérarchie et son propre système judiciaire. Au sein d’un état sorcier au sein d’un état moderne, se rebellant ainsi contre l’ordre établi et la vision imposée du monde. C’est à cause de cette autre manière de faire et de penser que les autorités officielles du Chili ont traduits en justice les membres de « La Recta Provincia ». Toutefois, même si l’organisation a été discréditée publiquement, celle-ci continue toujours à fonctionner aujourd’hui, de manière clandestine.

 

À mesure que le film avance, le personnage de Rosa se révèle à elle￾même. Avez-vous imaginé votre film comme un récit d’apprentissage ?

 

Rosa est une jeune fille indigène mais qui a été élevée par des colons européens ou allemands qui ont fait d’elle leur employée. Par conséquent, cela a pu l’éloigner de sa vision du monde. Après la mort de son père, elle décide de se lancer dans une longue quête de justice pour le venger. Mais c’est surtout à elle-même qu’elle va se rendre justice grâce à la sorcellerie. Ainsi, les sciences occultes apparaissent comme des forces rebelles capables de la transformer, de la responsabiliser et de la connecter à sa vision du monde. La sorcellerie apparaît ici comme une sorte de résistance face au projet colonisateur qui se manifeste sur l’île mais aussi en elle-même. C’est son arme de résistance à elle.

 

La fin du film laisse deviner une possible ouverture. Comment peut-on interpréter ce dénouement assez énigmatique ?

 

C’est une fin qui se prête à diverses interprétations. Je peux juste dire que la sorcellerie amène à cette idée de transformation et de pouvoir maximum. 

 

Brujería a une dimension cinématographique évidente. Aviez-vous des références en tête au moment de la préparation du film ?

 

Je souhaitais avant tout de capturer l’atmosphère de l’Île de Chiloé. À savoir un environnement humide, brumeux et ambigu où il est difficile de différencier les humains, les animaux et les plantes comme c’est le cas avec la sorcellerie. Pour réfléchir à cet espace géographique, j’ai fait beaucoup de recherches sur la lumière du lieu avec la directrice de la photographie, María Secco. J’ai également consulté de nombreux travaux de photographes, pour me saisir de l’atmosphère. Notamment ceux de Martina Hoogland, Josef Suek, Henri Prestes ou encore Richard Misrach. Ils ont tous été d’une grande inspiration.

 

L’intensité du film passe aussi par le travail sur le son. 

 

Le spectateur se retrouve totalement immergé dans un univers où les silences sont paradoxalement assez éloquents…En ce qui concerne le son, il était primordial de penser à l’atmosphère. Le concept de la brume sonore était important. J’ai voulu recréer une atmosphère aussi ambiguë où les pas, les oiseaux, la mer et la musique se mêleraient dans cette brume indéfinie qui circule tout au long de l’histoire. La sorcellerie est un concept que l’on peut rapprocher à ce manque de définition et d’incertitude.

 

Le reste du casting (Daniel Antivilo, Sebastian Hülk…) est réussi. Pourquoi avoir choisi ces comédiens ?

 

Il ne faut pas oublier les acteurs non-professionnels (rires) ! Ils sont originaires de l’île de Chiloé et sont incroyables, à l’image de Neddiel Muñoz Millalonco qui interprète Aurora. Ils apportent un contraste intéressant au reste du casting, composé de comédiens confirmés avec, effectivement, Daniel Antivilo et Sebastian Hülk. Sachant que Valentina Véliz Caileo faisait ici ses premiers pas devant une caméra, il me semblait indispensable de l’accompagner de personnes qui pourraient lui partager leurs expériences de cinéma.

 

L’image du film est assez esthétique. Comment avez-vous travaillé avec votre directrice de la photographie, María Secco ?

 

Maria est une collaboratrice importante pour moi. C’est une personne très sensible, très méticuleuse. Nous avons passé beaucoup de temps ensemble à analyser le scénario, à étudier les différentes textures de l’île, à voir les références et surtout à rechercher le type de langage adéquat. Je voulais qu’on ait l’impression d’être dans une chambre de sorcière, que l’on erre comme un être intangible dans l’atmosphère humide de l’Île de Chiloé. Maria a parfaitement compris ce que je recherchais. Grâce à son talent et au travail de toute l’équipe, j’ai pu réaliser une œuvre visuelle très organique.

 

Quels sont vos projets ?

 

Je fais actuellement des recherches et j’écris une histoire sur Rapa-Nui, l’autre nom de l’Île de Pâques. Je m’appuie notamment sur l’expédition de l’archéologue britannique Katherine Routledege en 1914, au milieu d’une rébellion indigène. Les notes qu’elle a prises cachent une histoire étonnante, mystérieuse et finalement méconnue. Le projet vient de recevoir le Fond Hubert Bals du Festival de Rotterdam pour son développement. C’est donc avec joie que nous commençons à mettre en chantier sur ce futur film !

CE QU'EN DIT LA PRESSE

TÉLÉRAMA

Sous couvert de surnaturel, le réalisateur tisse un conte initiatique, un peu austère, sans esbroufe, prétexte à explorer le passage à l’âge adulte et à revisiter une page d’histoire méconnue.

 

aVoir-aLire.com

Aux confins du fantastique, un récit bien écrit qui comporte plusieurs séquences saisissantes et décrit avec acuité l’oppression d’une communauté.

 

ABUS DE CINÉ

Christopher Murray, réalisateur et scénariste chilien, pose une intention claire : nous parler un peu plus de l’Histoire et des superstitions de son pays via un épisode de la colonisation.