Cesare Pavese, en parlant de son roman La Bella Estate, le décrit comme l’histoire d’« une virginité qui se défend ». Dans le film, cette virginité devient peut-être celle « d’une transformation ».
C’est l’histoire du corps de Ginia, qui grandit, désire, veut être vu et aimé. L’histoire de toutes les femmes qui entrent dans l’âge adulte, peu importe l’époque ou le lieu.
Le regard « féminin » et délicat de Pavese sur le monde, sur les désirs, l’amour et les hommes, a été le point de départ de cette adaptation cinématographique. Un saut réalisé avec autant d’amour que de crainte.
Le roman de Pavese, écrit il y a près de quatre-vingt-cinq ans, m’a immédiatement touchée dès ma première lecture. Il m’a paru incroyablement universel, profondément moderne.
Ginia, jeune femme en quête d’elle-même, craignant de ne pas être à la hauteur et de ne pas pouvoir explorer sa sexualité, rencontre Amelia, une autre jeune femme qui la conduit dans un monde nouveau, plein de tentations, de faux rêves et de fragilité. Elle l’entraîne dans un univers bohème, libre, audacieux, sans préjugés : celui de l’art et de la représentation.
Car le film est aussi une réflexion sur le désir d’être vu à travers les yeux d’un autre, d’être peint, photographié, immortalisé, et donc d’exister. Ginia poursuit cette illusion dans les années 1930, tout comme une jeune fille d’aujourd’hui qui aspire à voir son image sur les réseaux sociaux, être admirée, validée, pour enfin devenir « quelqu’un ».
Le roman résonne tellement avec notre époque qu’en racontant l’histoire de Ginia, j’ai eu l’opportunité de voir le monde à travers ses yeux, ceux d’une jeune femme, comme tant d’autres, dans ce moment crucial où l’on se découvre, où l’on se confronte à sa sexualité, à la croissance et à la quête de liberté.
Les hommes, cette fois, restent dans l’ombre, pris entre leur rôle de prédateurs et leur propre fragilité, victimes de leur condition. Pavese porte sur eux un regard sévère, mais j’ai voulu atténuer cette dureté tout en restant fidèle à son récit.
Ginia, sous la pression de la société, de son éducation et de son environnement, cède à un homme, car c’est ce que font toutes ses amies. Pourtant, dans la douleur de cette trahison envers elle-même, elle découvre la vérité de ses sentiments et trouve le courage de se libérer.
Seul le personnage du frère, une petite liberté artistique que je me suis permise, apporte la douceur d’un frère moderne, un frère d’aujourd’hui, qui comprend le tourment de sa sœur. Il joue à être un père, mais contrairement aux autres, il ne la juge pas.
L’été de Ginia est l’été de toute jeune femme confrontée à un choix.
Le film raconte cet instant décisif et universel où l’on devient adulte, où l’on retient son souffle pour exercer la plus grande des libertés : celle de choisir comment aimer, sans peur.