Réalisateur argentin reconnu pour ses œuvres sensuelles et subtiles, Marco Berger revient avec Les Amants Astronautes, une comédie romantique teintée de nostalgie. Depuis plus de 15 ans, Berger explore les zones grises entre homosexualité et hétérosexualité, déconstruisant les normes dans des décors estivaux, où les tensions sexuelles s’invitent dans les interactions masculines.
UN CINÉMA DE L’AMBIGUÏTÉ
Ses films, souvent situés dans des maisons de vacances baignées de chaleur, sont des huis clos où les corps se dévoilent et les désirs se révèlent. Les dialogues légers, les défis entre amis et les jeux virils deviennent des catalyseurs de désirs latents. Berger y brouille les frontières : ses personnages remettent en question leur orientation, tout comme le spectateur.« Si vous regardez un film sur un tueur, on ne vous prend pas pour un tueur. Mais si vous regardez un film gay, on vous demande : “Tu es gay ?” », déplore-t-il. « Ce genre de préjugé empêche beaucoup de gens de voir mes films. »
LES AMANTS ASTRONAUTES : DE LA COMÉDIE À LA VÉRITÉ
Pedro, un jeune homme ouvertement gay, rejoint une maison de vacances où il retrouve Maxi, un ami d’enfance prétendument hétéro. Entre eux naît une fausse relation, utilisée par Maxi pour manipuler son ex. Mais ce faux couple devient peu à peu une vraie connexion.Inspiré par le manque de rom-coms gay, Berger revendique une forme de militantisme par la comédie : « Je voulais une comédie romantique entre deux hommes, car cela existe à peine. Le rire permet de dire ce qu’on n’oserait pas exprimer autrement. »
HOMOSEXUALITÉ, SOCIÉTÉ ET CINÉMA
Grandissant à Buenos Aires, Berger a souffert d’un sentiment d’exclusion : « Mes amis avaient des fiancées, moi, rien. Le monde m’a volé ma jeunesse. » Cette frustration se traduit dans ses films, empreints d’une quête de tendresse masculine, souvent empêchée par les normes sociales ou la masculinité toxique, sujet central de son film Les Agitateurs (2022), inspiré d’un fait divers en Argentine. Il compare Les Agitateurs à Taekwondo (2016), autre huis clos masculin co-réalisé avec Martín Farina, plus doux et bienveillant : l’un révèle la violence du refoulé, l’autre la douceur du lien.
UNE ŒUVRE POLITIQUE, MALGRÉ ELLE
Malgré une filmographie riche et saluée, Berger peine à obtenir des financements à la hauteur :« J’ai fait 12 films pour moins que ce que certains reçoivent pour leur deuxième. Les grands producteurs n’osent pas me soutenir. Ils ont peur d’être étiquetés ‘cinéma gay’. » Et pourtant, il insiste : « Je ne fais pas des films gays. Je fais des films. On ne demande pas à Tarantino pourquoi il fait encore un film hétéro. »