À partir d’un scénario inconnu d’Antonioni, Une chronique américaine tisse les fils d’une aventure cinématographique avortée, de la mythologie de l’Amérique des années 70, et d’une dérive existentielle.
Loading...
À partir d’un scénario inconnu d’Antonioni, Une chronique américaine tisse les fils d’une aventure cinématographique avortée, de la mythologie de l’Amérique des années 70, et d’une dérive existentielle.
A venir
Alexandre Gouzou
Très tôt, son intérêt pour le cinéma, la photographie et la littérature l’a conduit à emprunter un chemin composite, croisant les différents médiums.
En 2018, il a obtenu le grand prix de photographie du Rendez-vous Image de Strasbourg et a été sélectionné dans la catégorie de photo documentaire du International Photographer of the year.
Il fait régulièrement des portraits photographiques pour la presse (Le Monde des Religions, Sciences et Avenir, La Croix, Jeune Afrique…) et réalise des commandes pour des entreprises et des évènements.
Auparavant, il a été assistant de production aux Films du passage sur les films de Raoul Ruiz, Valeria Sarmiento, Jacques Rozier, Alain Tanner, puis assistant réalisateur de Manoël de Oliveira, Anne Fontaine, Gérard Zingg, et a également réalisé 3 courts-métrages expérimentaux.
De 1993 à 1997, il a collaboré à l’écriture de pièces de Joël Pommerat (Les évènements, Pôles, Treize étroites têtes, Présences) et a co-écrit avec lui un scenario de long métrage (non réalisé).
De 1997 à 2003, il a dirigé Les Episodes, une revue littéraire qui a entre autres publié des inédits de Jack Kerouac, William Burroughs, Jim Harrison, Malcolm Lowry, Charles Bukowski, William T. Vollmann et de jeunes auteurs dont Gaëlle Obiégly, Valérie Mréjen, ou Hélèna Villovitch…
En 2003, il a signé un recueil de nouvelles publié aux éditions Liana Lévi (J’aurais voulu que tout soit autrement).
Jean-Claude Taki
Tout d’abord musicien, il collabore à plusieurs films (fictions, documentaires) en tant qu’ingénieur du son et compose des bandes sonores.
Il mène de front la réalisation de courts métrages dont la plupart ont été primés en France comme à l’étranger puis tourne un premier long métrage (AURORE / Number 9). En 2005, et ce pendant cinq ans, à l’initiative du Forum des Images de Paris, il continue son travail de cinéaste et pousse plus avant sa recherche formelle et narrative en utilisant un téléphone portable comme moyen de captation. Ses films sont alors diffusés aussi bien en salle de cinéma qu’en centre d’art [ LACDA (Los Angeles Center of Digital Art) / Museum of Contemporary Art – Washington DC, Centre Pompidou – Paris…].
Le festival Open Cinema de St Pétersbourg, le Forum des Images de Paris et le festival Côté Court de Pantin ont consacré un focus sur son travail, respectivement en 2008, 2010 et 2012.
En 2007 et 2013, il sort aux Editions Intervalles deux romans « LETTRES KAZAKHES » et « SOTCHI INVENTAIRE », et un livre de poésie illustré par Guillaume Reynard, « SOTCHI POUR MÉMOIRE ».
Février 2010, il présente “AUTOPORTRAIT 365” à l’exposition collective “le réel nouvel opium ?”, proposée par « est-ce une bonne nouvelle » à la Galerie Les Filles du Calvaire – Paris. Mars 2013, exposition HORIZON // TALES avec Guillaume Reynard à l’Alma Ata Art Center et au Consulat Français à Almaty – Kazakhstan.
En 2014-2016, Jean-Claude Taki est accueilli en résidence cinématographique à lʼEspace Khiasma, Les Lilas, dans le cadre du programme de La fabrique Phantom avec le soutien du département de la Seine- St-Denis, de la ville de Bobigny, et de Institut National de l’Audiovisuel.
En 2023, il présente UNE CHRONIQUE AMÉRICAINE au Festival du Film de Rome, et en 2024 au É Tudo Verdade / It’s All True – International Documentary Film Festival -Brésil, et à l’IndieLisboa 2024 – Portugal.
En 2024, sortie en salle le 20 mars de LES POUSSIÈRES.
Comment arrimer nos yeux à l’écran ? La pellicule défile, surexposée ou au contraire plongée dans le noir, faisant advenir des images d’extérieur, des plans de neige, d’autoroutes et de phares filant dans la nuit. On suit le regard de personne et de tout le monde, on est en Amérique, mais on pourrait être chez nous.
Après quelques minutes s’immisce une voix-off, racontant l’ossature d’un scénario qui n’a jamais été tourné. Intitulé Two Telegrams, rédigé par Michelangelo Antonioni et Rudy Wurlitzer, le projet en question a été repris, à dix années d’intervalle, par deux producteurs, avant d’être abandonné — aussi, Une chronique américaine ne se présente pas comme l’aboutissement tardif d’une production du maître italien, mais comme une hypothèse cinématographique, une œuvre formulée au futur antérieur, l’écho du film qu’il aurait pu être.
Une implosion donc, après l’explosion de Zabriskie Point : dans son cœur, Two Telegrams relate la vie d’une femme dont le désir mine le récit de part en part, et Une chronique américaine s’en approche de la meilleure manière possible, c’est-à-dire par la langue du cinéma. À cet égard, Une chronique américaine, dans son dialogue entre bande son et matière filmique, s’avère profondément godardien. Les plans montés, orphelins, prélevés d’archives, illustrent la trame, s’en éloignent, puis la frôlent : le ciment rose sang autour de la margelle de la piscine annonce la violence du dénouement, le planeur dans le bleu du ciel introduit la plongée sur la topographie urbaine qui suit, le saut dans l’eau (merveilleux !) dit le tremblement de la tension érotique. Etc.
Peut-être est-ce à cette fragilité que Une chronique américaine doit son caractère fantomatique. Selon les entretiens avec les deux producteurs, Paulo Branco et Stéphane Tchalgadjieff, que les réalisateurs ont placés respectivement à l’entame et à la fin du film (on file la métaphore de la dualité jusqu’au bout), l’adaptation de Two Telegrams aurait échoué dans un premier temps en raison de l’AVC d’Antonioni, puis — définitivement — par avidité et cécité de la part des agents hollywoodiens.
Peut-on fonder un film sur un constat d’échec ? Il y a une beauté plastique indéniable qui émane de Une chronique américaine, elle est due aux failles qui s’ouvrent à travers la juxtaposition des plans, ainsi qu’aux signes et aux objets qui viennent consteller la surface du film. Mais sans doute réside-t-elle aussi dans l’inquiétude qui monte du fond de cet assemblage d’ambiances et d’images.
C’est dans cette divagation, semble-t-il, que le film parvient à trouver le regard juste : il y a, dans ces séquences quelque chose que nous devons au cinéma muet, une interpellation mystérieuse, voire un salut qui vient de loin, à l’instar du geste de la petite fille du Déjeuner de Bébé qui agite sa main en direction des spectateurs. Est-ce le symptôme d’une inavouable nostalgie ? L’échappée du fantôme du cinéma, dans une fin aussi limpide que lumineuse, suggère le contraire : il s’agit d’une promesse de renouveau, d’une proposition inédite et passionnante, fondée sur les décombres d’un passé révolu.