Pourriez-vous nous en dire plus sur votre rencontre avec Richard Malka ? Pourquoi avoir eu l’envie de faire un documentaire sur sa plaidoirie ?
Avec la productrice Sophie Jeaneau, nous connaissions Richard Malka depuis longtemps. Mais nous ne l’avions pas revu depuis les attentats. Quand elle m’a proposé la réalisation de ce film, j’ai tout de suite accepté. J’étais encore émue par ce qu’il s’était passé. Par conviction, j’ai eu envie d’apporter ma contribution. Quand Richard Malka m’a raconté sa plaidoirie, à son bureau, j’ai su que ce texte si beau et si puissant deviendrait un élément fort du récit, un objet de cinéma. Je le voyais déjà vivre en images.
Comment avez-vous convaincu Richard Malka de faire ce documentaire ?
Comme Richard Malka nous connaissait toutes les deux, il nous faisait confiance. Et c’était nécessaire pour que le film se fasse. Cela dit, il n’a jamais vraiment compris dans quoi il s’embarquait exactement. Il demandait sans cesse : « Mais qu’est-ce que vous allez faire de tout ça ? ». Il a découvert le film à la fin, sur la table de montage. Durant le tournage, il m’a laissé le suivre et lui poser les questions que je voulais, y compris dans des moments de tension très délicats à gérer pour lui. Sa seule restriction a été de ne pas aborder sa vie privée. Ne pas se mettre en avant par rapport aux idées, c’était sa ligne.
Le documentaire jongle entre des passages en studio durant lesquels Richard Malka lit sa plaidoirie et de passages sur le terrain. Comment s’est déroulé le tournage, et notamment les moments « en extérieur » ?
Il y a deux temporalités dans le film. D’abord, le temps de lecture de la plaidoirie. Ce récit qui est un manifeste pour nos libertés, digne des grandes plaidoiries entrées dans l’Histoire, nous avons souhaité lui offrir un écrin particulier, une scène de théâtre, d’une grande épure, au milieu de laquelle Richard Malka s’est installé. Sa plaidoirie, il ne l’a pas jouée comme un acteur. Il l’a lue, avec sa diction, sa fébrilité. Et en parallèle, il y a ce suivi plus embarqué et instinctif avec une caméra légère sur le terrain. Ce temps est celui du présent. Richard Malka est un homme pressé, impatient, qui va droit au but. Il fallait saisir ses apartés, ses punchlines. Sans espérer de seconde prise ! Dans les deux cas, j’ai pu m’appuyer sur une formidable équipe de chefs opérateurs.
Quelles sont les spécificités et les difficultés de ce type de documentaire ?
Le film a été l’objet d’un long développement. Le tournage lui fut relativement court. C’est le travail d’écriture qui a été ardu. Vous savez, plus le budget est court, moins vous avez le droit à l’erreur. Il fallait à chaque fois s’interroger sur les scènes à tourner et privilégier les bonnes dans le brouhaha médiatique. La sélection des archives aussi fut un vrai péplum. Quand vous avez devant vous deux siècles d’Histoire, c’est assez vertigineux ! Avec le chef monteur Bertrand Collard, nous avons ensuite fait en sorte que cet entrelacs – la plaidoirie, le live et les images d’archives – soit comme un uppercut qui touche au cœur et à l’esprit, et bien sûr à la mémoire.
Qu’est-ce que vous avez voulu dire dans ce film ?
J’ai voulu faire mon travail de documentariste. Je raconte une histoire réelle, utile, importante. Celle du procès des attentats, celle de Charlie Hebdo, de Samuel Paty… Celle de la liberté d’expression et de la laïcité en France, un principe ravi aux siècles précédents à l’Église catholique. Un principe menacé aujourd’hui par l’islamisme radical. J’essaye d’apporter du sens et de la raison dans un monde d’immédiateté où les fake news et la propagande peuvent l’emporter sur l’information. Cette histoire est tout simplement celle de nous tous.