Fiction / Pays-Bas, Pologne

LE JOUR OÙ J’AI RENCONTRÉ MA MÈRE

Lu, onze ans, rêve de sa mère dans le lit de son foyer d’accueil. Celle-ci, dit-elle, est une célèbre cascadeuse hollywoodienne. Mais lorsqu’elle vient enfin lui rendre visite, Lu se retrouve malgré elle embarquée dans un road trip endiablé direction la Pologne. Elle se rend vite compte qu’avec Karina sa mère, c’est tout ou rien. La réalité va rapidement les rattraper et les obliger à décider de ce qu’elles sont prêtes à faire pour rester ensemble…

ANNÉE
RÉALISATION
SCENARIO
AVEC
FICHE TECHNIQUE
DATE DE SORTIE

2023

Zara DWINGER

Zara DWINGER et Nena VAN DRIEL

Rosa van LEEUWEN, Frieda BARNHARD, Lidia SADOWKA

1h32 – Couleur – Dolby Digital 5.1

17 avril 2024

BIOGRAPHIE DE LA RÉALISATRICE

Née en 1990 à Amsterdam, Zara Dwinger est réalisatrice et scénariste. Ses films à la fois sensibles et plein d’humour ont une esthétique très travaillée. Elle s’intéresse particulièrement aux jeunes personnages cherchant leur place dans la société. Elle a étudié l’anthropologie culturelle avant d’intégrer la « Dutch Film Academy » (Académie Néerlandaise du cinéma) dans la section réalisation. C’est dans ce cadre qu’elle a réalisé Liv (2016), puis Sirene (2017), un court métrage portant sur les questionnements autour du genre et de l’identité à l’adolescence. Acclamé par la critique, il a été présenté pour la première fois au festival de Clermont-Ferrand. Après avoir obtenu son diplôme en 2017, elle a réalisé le court métrage : Yula & Juliet (2018), une version contemporaine de Roméo et Juliette. Présenté en avant-première à la Berlinale, ce film a cumulé plus de 10 millions de vues sur Vimeo. Son premier film en tant que scénariste, A Holiday from mourning (2020), est un récit sur le deuil d’un adolescent qui a été sélectionné au Palm Springs ShortFest. Pendant la pandémie, Zara Dwinger a écrit et réalisé le moyen métrage The Girl who was cursed (2021) sur une jeune fille à la recherche de son père. Présenté au Slamdance Film Festival 2023, il a été sélectionné pour le Veau d’or aux Pays-Bas. Enfin, Zara Dwinger a été sélectionné comme « Talent en Route » * par le Festival du film néerlandais et dans les deux programmes du festival Cinekid d’Amsterdam : Writers LAB et Directors LAB. Kiddo (Le jour où j’ai rencontré ma mère) est son premier long métrage en tant que réalisatrice. Il a déjà été présenté à la 73ème Berlinale dans la catégorie Generation Kplus et poursuit sa carrière en festivals à l’international.

ENTRETIEN AVEC LA RÉALISATRICE

Propos recueillis par Gert Herman

 

Le jour où j’ai rencontré ma mère explore les limites du genre dans un aventureux road trip mère/fille vers la Pologne, à bord d’une Chevrolet bleue dont le lecteur CD cassé joue toujours la même chanson. En chemin, elles s’arrêtent dans des restaurants et des motels au bord de la route. Lu, qui a grandi dans un foyer d’accueil, connaît à peine sa mère Karina, et sa confiance est profondément mise à l’épreuve. Mais pour réaliser leur rêve, elle est prête à faire beaucoup. Le jour où j’ai rencontré ma mère possède plusieurs atouts : une esthétique lumineuse et stylisée, deux merveilleux personnages principaux, l’adorable compagnon de voyage de Lu (Henk, le serpent) et des leçons de vie un peu douteuses. Par exemple : crier très fort au moins une fois par jour.

 

Zara, avez-vous déjà crié aujourd’hui ?

 

Non, pas encore. J’aurais probablement dû le faire. Il est important d’avoir un exutoire pour tous ses sentiments en ébullition. Pour certaines personnes, c’est crier, pour d’autres, ça peut être autre chose. Pour moi, c’est caresser mon chat. Mais peut-être que crier pourrait aussi fonctionner très bien.

 

Le jour où j’ai rencontré ma mère ressemble à un film de genre… mais je n’arrive pas à définir exactement lequel.

 

Celui « des amoureux en fuite », un mélange de road movie et de coming-of-age. De fait, une grande partie du film se déroule dans des stations-service, des motels et des restaurants. Lorsque j’ai fait le premier briefing sur les lieux de tournage, je me suis dit : ce n’est pas possible, nous sommes en Pologne, pas en Amérique. Mais pour moi, il n’était pas nécessaire que tout soit parfait. L’équipe de repérage a trouvé beaucoup d’endroits géniaux. Notre caméraman cherchait pendant des heures sur Google Maps et s’il voyait quelque chose d’intéressant, nous y allions en voiture et souvent, c’était génial. C’est comme ça que nous avons trouvé la majorité de nos lieux en Pologne. La rue près du foyer se trouvait aux Pays-Bas dans un quartier qui a été démoli six mois plus tard. Il ressemblait exactement à un décor de cinéma puisque la moitié des maisons étaient à l’abandon.

 

Comment expliquer le côté romantique des stations-service ?

 

La relation entre Lu et Karina est volatile – Karina n’est pas présente pour Lu et quand elle l’est, elle peut disparaître en une seconde. Je cherchais ça aussi dans les lieux. Elles n’arrivent et ne restent jamais très longtemps quelque part. Dans un motel, on défait à peine ses bagages parce que l’on repart aussitôt, dans une station service, on reste juste le temps de faire le plein…

 

Plus que des scènes de films, ces lieux me rappellent des photographies.

 

C’est vrai. La photographie était une de nos sources d’inspiration, notamment les photographies américaines des années 50 et 60. William Eggleston a pris de superbes photos de ces lieux si particuliers. Grâce à ces images emblématiques, nous avons essayé de nous rapprocher des films “d’amoureux en fuite” comme Bonnie & Clyde et Thelma & Louise.

 

Un endroit s’est pourtant démarqué…

 

Les dinosaures ! Je voulais briser une certaine monotonie dans nos emplacements. En Pologne, il existe de nombreux dinoparcs, certains d’entre eux sont magnifiques ; le nôtre était carrément moche… mais très amusant !

 

Pourquoi avoir choisi la Pologne ?

 

Pour un road movie, les options aux Pays-Bas et en Belgique étaient plutôt limitées. Et il y a un lien avec la réalité de notre pays où il arrive souvent qu’en cas d’enlèvements d’enfant par un parent, ce soit vers la Pologne et qu’ils s’agissent surtout d’acte commis par des mères.

 

Connaissez vous la véritable histoire de Karina ?

 

Non, nous nous en tenons au point de vue de Lu. Le jour où j’ai rencontré ma mère parle d’un parent qui est en dehors de la norme, et de la façon dont un enfant gère cela. À cet âge, on ne comprend pas toujours pourquoi un adulte se comporte de manière bizarre ou non conventionnelle. Lu comprend un peu, mais pas complètement. Nous restons vagues au sujet de Karina ; nous avons fait des recherches sur le trouble de la personnalité et la bipolarité, mais je ne voulais pas donner d’informations exactes. Dans la vie, on a toujours envie de mettre des étiquettes – parfois c’est bien – mais on ne voulait pas s’y aventurer. De toute façon, Karina n’aime pas les étiquettes. Elle se bat avec sa santé mentale, mais chacun est libre d’en faire sa propre interprétation ou diagnostic.

 

Que dit votre film sur la maternité ?

 

Nous avons écrit du point de vue d’un enfant ; il ne s’agit donc pas tant d’« être mère » que d’« avoir une mère », une mère qui ne pourra jamais être complètement présente pour vous. Karina lutte avec cette responsabilité et préfère s’enfuir. Notre film fait appel à la compréhension et à l’empathie pour toutes les mères et enfants qui entretiennent une telle relation. Réunies dans une chambre d’hôtel, elles n’ont finalement pas grand chose à se dire. Elles n’échangent pas de banalités. Elles ne se sont pas vues depuis des années et ont besoin d’explorer un peu les choses. Elles se connaissent à peine et ont toutes les deux de fausses attentes. Lu a une image romancée et idolâtrée de sa mère et il est difficile de créer un véritable lien avec quelqu’un comme Karina.

 

Il y a peu de dialogues dans votre film ; souvent, tout est dit en un ou deux mots. Mais cette phrase « Dans la vie, c’est tout ou rien » a une grande importance… 

 

Cette attitude face à la vie se retrouve souvent chez les personnes borderline, TDAH, etc… Soit vous vous lancez à fond, soit vous fuyez. Mais ce n’est pas viable ; Karina doit apprendre qu’il n’est pas toujours nécessaire que ce soit tout ou rien. Je suis aussi ce genre de personne « tout ou rien », ou “tout noir, tout blanc” – mais sur Karina, ça a une influence destructrice.

 

J’ai apprécié que vous donniez une image positive du placement familial : chaleureuse et compréhensive, très différente de l’image habituelle. 

 

Lu a trouvé un endroit chaleureux et stable où vivre, non pas avec sa mère, mais avec quelqu’un de gentil et où elle a construit sa vie avec d’autres enfants. Je comprends que vous préfériez être avec votre vraie mère – les enfants font souvent preuve d’une grande loyauté envers leurs parents (absents) – mais pour de nombreux enfants, une famille d’accueil comme celle-ci peut- être une bonne solution.

 

Vous n’avez pas eu de chance avec votre bande-son, le CD est resté coincé dans le lecteur de la voiture !

 

Dans un road movie, on peut aller dans de nombreuses directions avec la musique et l’idée que le CD joue toujours la même chanson va avec la maladresse de leur voyage. Stay Awhile de Dusty Springfield est une belle chanson avec un côté sixties qui s’accorde parfaitement avec la voiture et le monde fantasque que Karina s’est créé. Le film est divisé en chapitres. Un road movie raconte souvent une histoire sinueuse, une suite de petits incidents. C’est pourquoi nous avons travaillé avec des chapitres au montage, pour créer un cadre, ajouter un aspect féerique et donner un élan supplémentaire à l’histoire. J’aime les figures de style de ce genre.

 

C’est ce que je pensais : votre film en est rempli ! 

 

Je voulais que les pensées de Lu soient représentées de manière enfantine. Pour les couleurs, nous nous sommes inspirés de la photographie, et pour la caméra, nous avons notamment regardé les films de Jim Jarmusch. Au montage, nous accentuons encore davantage ce monde imaginaire grâce au son. De nombreux mouvements sont accompagnés d’effets sonores, comme dans un dessin animé. Tout a été magnifié, comme le voyage dans les fantasmes et les rêves des personnages principaux.

 

Le véritable héros du film est Henk, le serpent de Lu. Comment était Henk en tant qu’acteur ?

 

Très détendu. Rosa (Lu) s’occupait de l’animal depuis quelques semaines et ils s’entendaient vraiment bien. Avant même de le rencontrer, elle avait déjà pensé à un nom : « Il devrait s’appeler Henk ». Ensemble, avec le « Henk de secours », il vivait dans un gigantesque terrarium que nous avons traîné à travers la Pologne. Au Cinekid Script Lab, on nous avait suggéré de donner à Lu un acolyte. Un animal de compagnie, c’était une bonne idée, à condition qu’il ne soit pas trop gentil ou trop mignon. Le serpent la rend un peu « différente » et prouve que Lu – contrairement à sa mère – peut prendre soin de quelqu’un. Henk s’est perdu une fois, le dernier jour du tournage. C’était la panique ! Il se cachait probablement sous le tapis sur lequel nous étions tous debout. Il s’en est sorti indemne et nous l’avons retrouvé derrière un placard.

LISTE TECHNIQUE

Un film de Zara Dwinger

Écrit par Zara Dwinger et Nena van Driel

Producteurs : Layla Meijman, Maarten van der Ven

Coproductrice : Marina Blok / NTR broadcasting

Producteur délégué : Maarten van der Ven

Directeur de la photographie : Douwe Hennink

Monteur : Fatih Tura

Compositeur : Jac van Exter

Conception sonore : Zita Leemans

Mixage : Michel Schöpping

Son : Kamila Wójcik, Peter Strijbos

Chef décorateur : Bram Doyer

Costumes : Vita Mees

Coiffure et maquillage : Renee Wijnhoven

Casting : Saida van der Reijd, Małgorzata Lipmann

Casting enfants : Elske Falkena, Luca Meisters

Assistants réalisateur : Tony van der Veer et Noen Brouwer

Cheffe électricienne : Janneke Hoogenboom

Supervision musicale : Laura Bell

Couleurs : Joppo in de Grot

Effets spéciaux : Luuk Meijer

Post-production : Maarten de Graaf

Directrices de production : Mireille Crone-Rooijendijk,

Alicja Jagodzinska-Kałkus

Ventes internationales : SKOOP Media

Version sous-titrée français : Le Joli Mai

Version française : MJM Postprod

LISTE ARTISTIQUE

Rosa van Leeuwen (Lu)

Frieda Barnhard (Karina)

Lidia Sadowka (la cousine de Karina)

Aisa Winter (la responsable du foyer d’accueil)

Maksymilian Rudnicki (Grzegorz)

CE QU'EN DIT LA PRESSE

L’HUMANITÉ

Bref, au-delà du regard amusé que porte Zara Dwinger sur l’amoralité d’une mère gentiment irresponsable, adepte du resto-basket, toujours prête à sortir des rails et des conventions sociales, Le jour où j’ai rencontré ma mère est un bain de jouvence grâce à la candeur de son imagerie kitsch transposée dans le monde d’aujourd’hui sur un mode aussi réaliste que rétro.

 

TÉLÉRAMA

Un road movie endiablé et touchant sur une enfance chahutée.

 

LES FICHES DU CINÉMA

Une comédie stimulante interrogeant de façon tendre et maligne le rôle de l’adulte.

 

LES INROCKUPTIBLES

Malgré quelques gimmicks ronflants, le premier film de Zara Dwinger nous embarque dans un road trip ébouriffant.

 

PREMIÈRE

Derrière ses airs mélancoliques, Le jour où j’ai rencontré ma mère est un splendide feu de joie.